Le developpement des capacités technologiques et industrielles chinoises inquiète le Pentagone

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Chaque année, le Secrétariat à La Défense des Etats-Unis publie, à destination du Congrès, un rapport sur les développements sécuritaires et technologiques de la République Populaire de Chine. Au fil des dernières années, ce rapport est devenu de plus en plus pressant sur de nombreux aspects, comme la construction et la mise en oeuvre rapide des moyens de déni d’accès sur les cotes chinoises et en Mer de Chine, l’extension de la flotte de Pékin, ainsi que sur les profondes évolutions qui s’opèrent au sein de l’Armée Populaire de Libération. Pour la première fois, cette année, alors que les tensions entre Washington et Pékin sont au plus haut, le rapport indique de manière explicite que les Etats-Unis ont perdu, face à la Chine, l’avantage technologique et opérationnel dans certains domaines, comme la défense anti-aérienne et anti-missile, les drones de combat, les armes balistiques et missiles de croisière, et, comme nous l’avions déjà traité il y a quelques jours, dans le domaine de l’industrie navale militaire.

Outre ces domaines dans lesquels le dynamisme militaro-industriel chinois surpasse effectivement celui des Etats-Unis sans la moindre contestation possible, le rapport met également l’accent sur plusieurs avancées notables en cours ou prévues par Pékin pour les années à venir. Parmi elle, le DoD estime que la Chine va doubler, dans la décennie à venir, le nombre de têtes nucléaires en service dans ses forces armées, qui passera de 200 à 400 têtes nucléaires d’ici 2030 selon les analystes américains. Si ce nombre restera très inférieur aux 3600 têtes nucléaires dont disposeront Washington et Moscou, il représente toutefois un sujet d’inquiétude pour le DoD, qui craint une reprise de la course aux armements, et notamment concernant les armements nucléaires dans le monde. Malgré les pressions américaines, les autorités chinoises ne veulent pas, en effet, rejoindre les accords New Start entre Etats-Unis et Russie, qui limiteraient sa propre capacité à accroitre son arsenal nucléaire, jugeant, probablement avec de bons arguments, que les deux pays disposent déjà d’un avantage nucléaire excessif vis-à-vis de la réalité géopolitique qu’ils représentent. Rappelons, à ce titre; que la Chine a aujourd’hui moins de têtes nucléaires que la France, qui dispose de 300 armes, et sensiblement le même nombre que le Royaume-unis, qui en a 215.

Dongfeng 41 ICBM china Actualités Défense | Armes nucléaires | Budgets des armées et effort de Défense
Entré en service en 2017, le missile nucléaire intercontinental chinois DF41 peut atteindre des cibles distantes de 15.000 km et mettre en oeuvre jusqu’à 10 MIRV d’une puissance allant de 20 à 150 kilotonnes.

Le rapport s’attache également à décrire les évolutions en cours au sein de l’APL en matière de doctrine, qui passe, à l’instar de celle appliquée aux Etats-Unis et en Europe, d’une doctrine « info-centrée » à une doctrine centrée autour de l’intelligence partagée, faisant largement appel à l’Intelligence Artificielle, au Cloud Computing, au Big Data et, naturellement, aux réseaux de communication. Ce changement inquiète particulièrement le Pentagone, qui a fait de cette doctrine le coeur de son avantage opérationnel pour les années à venir. Il semble, dès lors, que Pékin soit déterminé à ne pas laisser Washington prendre le large dans ce domaine. Dès lors, le rapport de force potentiel entre les forces armées des deux super-puissances s’évaluera, à l’instar de ce qui se faisait par le passé, surtout sur la base des forces numériques, aucun acteur n’ayant d’avantage technologique ou doctrinal suffisamment marqué pour faire la différence.

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Reste, évidemment, l’experience du combat et des opérations militaires de grande ampleur, domaine dans lequel les forces américaines ont un avantage très net sur les forces chinoises, qui n’ont pas connu d’engagement majeur depuis la guerre sino-vietnamienne de 1979. Ainsi, dans le domaine naval, si Pékin dispose effectivement d’un nombre supérieur de navires et sous-marins en service, avec 350 unités contre 293 pour l’US Navy, l’experience de la Marine chinoise en matière d’opération navale océanique ou de projection effective de puissance, est très limitée, pour ne pas dire nulle. En effet, même aujourd’hui, ses grandes unités navales n’évoluent que très rarement en dehors de la zone de couverture de l’aviation chinoise. De même, la Marine chinoise n’a guère eu l’occasion de s’entrainer avec des marines majeures expérimentées, en dehors de la flotte russe du Pacifique. Toutefois, rien ne garanti que l’expérience acquise par les flottes occidentales dans ces domaines soit de nature à compenser l’infériorité numérique grandissante face à la Chine, qui, par ailleurs, à toutes les chances d’opérer, effectivement, plus prés de ses cotes que de celles des Etats-Unis.

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Si la flotte chinoise s’est considérablement accrue ces dernières années, elle continue de n’évoluer majoritairement qu’à proximité de ses ports d’attache, sous la couverture de l’aviation chinoise basée à terre.

En tout état de cause, le rapport présenté par le DoD cette année au Congrès, démontre que, désormais, la Chine est incontestablement un concurrent des plus sérieux, et un adversaire potentiel à redouter si un conflit venait à éclater, nécessitant des adaptations rapides des forces américaines, afin de ne pas se retrouver rapidement distancés dans plusieurs domaines critiques. Il appèle également à ce que la doctrine de Défense américaine s’articule désormais avec l’objectif de contrer la puissance militaire chinoise, à l’instar de la doctrine chinoise, conçue pour prendre l’avantage, dans le temps, sur les Etats-Unis et leurs alliés. Il rejoint, en cela, les réflexions en cours, que ce soit au Pentagone, dans l’US Navy, l’US Air Force et le Marine Corps, tous portant une grande attention aux évolutions en cours et à venir au sein des forces armées de Pékin, et aux solutions à mettre en oeuvre pour être en mesure de les neutraliser. Alors que le budget de la Défense des Etats-Unis a déjà atteint un plafond qui n’est pas appelé à évoluer, les marges de manoeuvre, pour les militaires comme pour les parlementaires américains, sont désormais très étroites. De toute évidence, comme nous le titrions il y a quelques mois, Pékin a bel et bien surpris les Etats-Unis en matière de puissance militaire.

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