Malgré les sanctions, la Russie a déjà exporté pour 11 Md$ d’équipements de Défense en 2019

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Le 2 aout 2017, le président américain D.Trump promulguait le Countering America’s Adversaries Through Sanction Act, ou CAATSA, un arsenal législatif destiné à dissuader les pays d’acheter des équipements de Défense aux adversaires de Etats-Unis, ciblant précisément la Russie. Depuis, la menace que représente le CAATSA a été plusieurs fois brandie, en Turquie et en Inde au sujet des systèmes S400, en Egypte et en Indonésie au sujet des Su35, et de façon moins visibles, dans de nombreux pays africains, asiatiques, sud-américains et même européens. Ces menaces n’ont cependant pas été très efficaces, même si elles ont entravé l’exécution de certains contrat en empêchant, par exemple, l’utilisation du système interbancaire de paiement international SWIFT et du dollar pour les paiements, obligeant la Russie et ses clients à mettre en oeuvre des modalités d’échange alternatifs.

En effet, selon l’agence Rosoboronexport, qui traite des exportations de Défense russe, et les déclarations du président de Rostec, Sergei Chemezov, à l’occasion du salon Dubai Air Show, l’Industrie de Défense nationale aurait enregistré, début novembre 2019, plus de 11 Md$ de prises de commande sur l’année 2019, laissant espérer un total en fin d’année entre 13,5 et 13,7 Md$, soit un montant sensiblement équivalent à ceux des années précédant la mise en oeuvre du CAATSA. Début novembre, la Russie avait en effet signé plus de 800 contrats d’exportation d’armements avec 43 pays, soit un peu moins de 25% des pays existants, mais prés de la moitié des pays disposant d’une force militaire. Depuis, plusieurs annonces ont été faites, que ce soit la commande système Pantsir à la Serbie, ou de chars de combat T90 à l’Inde.

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L’Inde a commande le 11 novembre 469 chars T90 assemblés sur place pour renforcer les 1100 exemplaires déjà en service

Il est interessant de constater, une fois de plus, que la communication portée par Rosoboronexport, comme celle de Rostec, fait état de plusieurs discussions concernant le Su57E, dont celles avec la Turquie, venant là encore, atténuer la portée des déclarations laissant supposer une marche arrière des autorités russes dans ce dossier. Il est probable, comme nous l’avions écrit hiers, que cette déclaration n’avait pour objet que de porter un message à Ankara, alors que les Etats-Unis ont réactivé l’offre concernant un accord commercial de 100 Md$ si la Turquie venait à renoncer aux S400, déjà livrés en intégralité par ailleurs. Il faut noter que la législation CAATSA a toutefois eu des effets notables dans certains dossiers, en tout cas jusqu’ici, puisque, par exemple, Belgrade a renoncé à acquérir des systèmes S400 pour cette raison, et Le Caire semble avoir renoncé à l’acquisition du Su35s pour l’heure.

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D’autres alliés des Etats-Unis, en revanche, semblent être immunisés contre ces menaces, comme l’Inde qui a maintenu sa commande de S400, et qui n’a pas été menacée outre mesure. Riyad continue à négocier avec Moscou au sujet de l’acquisition de systèmes anti-aériens S400 (et Pantsir), renforcée dans l’idée par l’échec des systèmes américains Patriot à protéger ses installations pétrolières contre des missiles de croisière et des drones. Quand aux Emirats Arabes Unis, ils semblent assumer une négociation au sujet d’une possible acquisition de chasseurs Su35, et même la mise en oeuvre d’un partenariat technologique avec Rostec au sujet du Su57E. Or, le potentiel commercial que représentent ces 3 pays pour l’industrie de Défense américaine semblent dissuader Washington de mener une politique trop agressive en application du CAATSA envers eux, créant, de fait, une forme de « Législation à géométrie variable », très peu crédible sur ses justifications internationales.

Lanceurs du systeme S400 des forces de defense anti aeriennes russes Analyses Défense | Contrats et Appels d'offre Défense | Coopération internationale technologique Défense
Le S400 est au coeur du bras de fer entre les Etats-Unis et la Russie en Turquie et en Inde

Au final, la législation CAATSA n’aura réussi, en un peu plus d’un an, qu’à donner l’impulsion nécessaire à la Russie et la Chine pour developper des mécanismes d’exportation et de paiement dissociés des mécanismes américains et du dollar, créant une forme de retour à la situation qui prévalait pendant la Guerre froide dans ce domaine. Loin d’entraver les capacités d’exportation de la Russie, de la Chine, ou d’autres pays comme l’Iran ou la Corée du nord, cette législation, et la vision unilatérale de la gestion des affaires mondiales portée par le président Trump, n’auront finalement réussi qu’à affaiblir les capacités de regulation qu’offrait le système mondial jusqu’à présent.

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