La signature le 10 octobre d’une lettre d’intention entre Athènes et Paris pour l’acquisition de deux frégates FDI (Frégate de Défense et d’Intervention), plus très probablement la construction de deux autres en Grèce, ouvrait les discussions techniques pour rapprocher la FDI du besoin militaire de la marine de guerre hellénique. Plutôt que d’augmenter le nombre de silos du système de lancement vertical, les dernières discussions menées à Athènes cette semaine montre que la marine de guerre hellénique demande des évolutions à la marge afin de renforcer les capacités anti-aériennes de la frégate grâce au choix de la pièce d’artillerie navale, d’un système anti-aérien à courte portée et d’un troisième type de missiles.
Les points structurants des discussions franco-grecques est la nécessité d’aller vite car dans l’optique d’une potentielle commande de quatre FDI les commandes d’approvisionnement à long terme doivent être passées aux industriels concernés avant le 31 janvier 2020. Et pour aller vite dans le cadre d’un exercice financier contraint pour les deux parties, l’une des solutions les plus probables est que Paris face évoluer à la marge la version Marine nationale. Deux des points durs des discussions franco-grecques seront très probablement le nombre de missiles anti-aériens pouvant équiper les FDI grecques et le choix de ces missiles.
La version Marine nationale de la FDI est forte de deux lanceurs octuples SYLVER (SYstème de Lancement VERTical) A50 qui peuvent ensiloter un mélange de 16 missiles ASTER (AéroSpatial TERminal) 15 ou 30. Des réserves existent entre ces lanceurs et le bloc passerelle pour deux SYLVER supplémentaires qui peuvent être soit des A50 (ASTER 15 et 30) ou des A70 (MdCN).
À la demande de la marine de guerre hellénique, le système de lancement vertical de la version grecque des FDI sera portée à quatre lanceurs octuples SYLVER (SYstème de Lancement VERtical) avec trois A50 (ASTER 15, 30) et un A70 (Missile de Croisière Naval (MdCN), soit 32 missiles au total dont 8 MdCN.
Une réflexion fut menée depuis 2017, au plus tard, quant au nombre de plateformes de la Marine nationale capable de tirer le MdCN, c’est-à-dire six FREMM (FRÉgates Multi-Missions) et six sous-marins nucléaires d’attaque de la classe Suffren. Les débats se sont focalisés sur l’adoption par les FDI de la même configuration que les frégates Bretagne et Normandie du programme FREMM, c’est-à-dire deux SYLVER A50 plus deux SYLVER A70 permettant d’ensiloter 16 ASTER 15/30 et 16 MdCN.
Eu égard aux dernières informations, la demande grecque devrait être satisfaite sur ce point architectural grâce à une évolution partielle de la version Marine nationale. Le recours aux réserves pour intégrer deux SYLVER supplémentaires sera permis par des études devant bénéficier aux deux marines, études qui se résumeront à relier ces lanceurs au système de combat et aux différents réseaux du bord. Par contre, les FDI de la Marine nationale n’adopteront pas le même panachage de SYLVER que la version grecque, si bien que le nombre de missiles ASTER embarqués sur les FDI sera le même que sur les FREMM : 16 missiles, ce qui est toujours jugé suffisant face à l’évolution des menaces.
Les caractéristiques opérationnelles des FDI grecques se distingueront de la Marine nationale sur trois points supplémentaires : le choix de la pièce d’artillerie navale, d’un système anti-aérien à courte portée et d’un troisième type de missiles.
La marine de guerre hellénique retiendrait, à la différence de la France, le 76 mm STRALES (2004) d’OTO Melara en cours d’installation sur les bâtiments italiens en remplacement de la précédente version (Super Rapido (1985). Le système STRALES peut engager plusieurs missiles assaillants grâce à son obus guidé DART (Driven Ammunition Reduced Time of flight) jusqu’à 8000 mètres avec une vitesse en sortie de bouche portée à 1200 m.s-1 contre 900 m.s-1 pour la version précédente. Ce système tend à concurrencer les CIWS (Close-In Weapon System), grand point d’attention de la marine grecque.
Il est aussi étudié de renforcer la défense anti-aérienne à très courte portée grâce à l’acquisition de systèmes SIMBAD RC (Remoted Control) de MBDA. Ce système se compose d’un lanceur pouvant être téléopéré par un opérateur en passerelle ou bien asservi au système de combat qui peut tirer jusqu’à deux MISTRAL (MISsile TRansportable Anti-aérien Léger) dont la portée maximale avoisine les 6000 mètres.
En plus des ASTER 15 et 30, la marine de guerre hellénique demande l’intégration de missiles CAMM (Common Anti-air Modular Missile) de MBDA. Ce missile anti-aérien de courte portée (~ 25 km de portée) recèle la faculté de pouvoir être groupé par quatre dans un seul tube d’un lanceur SYLVER. Le nombre maximum de missiles anti-aériens ne serait plus de 24 ASTER 15/30 mais serait compris entre ce minimum et un maximum tout théorique de 96 missiles CAMM.
En synthèse, il ressort de ces discussions que la marine grecque vise à renforcer drastiquement les capacités de défense aérienne terminales grâce à une nouvelle pièce d’artillerie et l’ajout du système anti-aérien à très courte portée SIMBAD-RC. Par contre, ces dernières capacités visent à parer les missiles assaillant ayant été manqués par les missiles à plus longue portée. Le SIMBAD-RC est demandé, pas le TETRAL dont le lanceur tir des salves de quatre MISTRAL. L’effort principal des demandes grecques pour que la FDI soit adaptée à son besoin militaire porte sur l’augmentation du nombre de missiles qui ne sera plus limité à 24 grâce au choix du CAMM.
Par Ioannis NIKITAS (Defense review) et Thibault LAMIDEL