mardi, mars 19, 2024

La grande confusion syrienne !

La fin officielle des hostilités entre les Forces Démocratiques Syriennes et les Forces Turques, actée par l’entremise de la Russie qui a obtenu du YPG Kurde le retrait d’une bande de 32 km longeant la frontière turco-syrienne, donne désormais lieu à une immense confusion, chaque acteur ne sachant plus qui est qui, et comment réagir. Ces deniers jours ont ainsi vu les forces turques effectuer un tir d’artillerie à moins d’un kilomètre d’un point d’appuis des forces américaines, ainsi que d’une frappe aérienne turque sur le sol irakien, contre des terroristes identifiés du PKK selon le communiqué d’Ankara. Coté américain, le redéploiement des forces spéciales pour « protéger les infrastructures pétrolières », ordonné par le président Trump, s’est fait sans réel plan d’action. La situation créée artificiellement dans le nord de la Syrie par la Russie risque fort, à plus ou moins court terme, de se transformer en un chaos indescriptible avec des risques d’escalade non négligeables.

Pour la Turquie, le succès de l’opération militaire semble avoir donné des ailes au président Erdogan, qui n’hésite pas à braver la no Fly zone de la coalition au dessus du territoire irakien, pour frapper des membres identifiés du PKK. En outre, il semble que malgré le retrait des kurdes du YPG de la bande de 32 km exigée par Ankara, les forces turques continuent de mener des attaques par drone dans la profondeur du dispositif des forces démocratiques syriennes. Les milices pro-turques font également beaucoup parler d’elles, avec de nombreux rapports d’exactions, et un accrochage sérieux avec les forces de Damas, ayant donné lieu à la capture de prisonniers. La seconde frappe d’artillerie à proximité des forces américaines, si elles n’a là non plus pas fait de victime, apparait comme une démonstration de force pour signifier clairement qui a les cartes en main dans la région.

T129 vehicuel APC turc Syrie Actualités Défense | Conflit Syrien | Déploiement de forces - Réassurance
Les forces armées turques ont déployé de très importants moyens blindés, d’artillerie et aériens, pour prendre le dessus sur les forces kurdes du YPG

La Russie, et son allié syrien de Damas, ont un profil étonnamment bas ces derniers jours. Moscou a négocié avec les autorités syriennes la location d’une nouvelle base aérienne dans le nord est du pays, un point critique pour rayonner sur l’ensemble de la région. Des rapports indiquent également que l’état-major russe procède à un renforcement significatif des forces déployées dans la zone, avec le déploiement de plusieurs centaines de militaires supplémentaires. Ces différentes annonces indiquent que le Kremlin anticipe bien un durcissement des tensions à venir, et se prépare à défendre, comme il l’avait fait depuis 2015, le régime de Damas, et les positions stratégiques en Méditerranée orientale que procurent les bases syriennes.

La position des Etats-Unis est, sans contexte, la plus confuse, que ce soit sur le terrain comme au niveau diplomatique. Ainsi, les forces blindées déployées la semaine dernière à partir d’Irak pour, officiellement, protéger les infrastructures pétrolières syriennes et empêcher qu’elles ne retombent aux mains des radicaux islamistes, l’ont été sans réel plan d’action, et sans règles d’engagement. Les règles d’engagement définissent le cadre opérationnel dans lequel les forces américaines ont l’autorisation de faire usage de la force. Sans ce cadre, les forces américaines sont sensiblement handicapées.

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Le déploiement des forces US pour protéger les infrastructures pétrolières syriennes a été ordonnée sans plan d’action et règles d’engagement

En Europe, et en France en particulier, la discretion est de mise. En dépit de quelques mesures symboliques concernant l’interdiction d’exportation d’armes vers la Turquie prononcées par certains pays de l’Union européenne pour répondre à l’émotion de l’opinion publique, le quotidien semble avoir effacer du débat public la crise syrienne, ses implications sécuritaires, et l’absence dramatique de poids dans ce dossier.

Quoiqu’il en soit, et en dépit de l’apparente accalmie des tensions qui transparait dans les médias, la situation est encore bien loin d’être stabilisée en Syrie. La Turquie semble de plus en plus déterminée à user de sa puissance militaire pour étendre sa domination locale, en s’appuyant sur l’argument de la menace terroriste kurde. La Russie, et la Syrie de Damas, semblent eux anticiper la résurgence de tensions, et consolident leurs positions défensives. Les Kurdes du YPG, après avoir fait le dos rond pour éviter le massacre, représentent toujours une force militaire non négligeable, qui pourrait s’appuyer sur les Peshmerga irakiens, bien plus puissants militairement avec plus de 650.000 hommes, si les attaques turques en Irak venaient à se répéter. Quand aux occidentaux, s’ils sont toujours présents, ils ont considérablement entamés leurs crédits, que ce soit par les décisions de D.Trump, ou par l’inconsistance européenne. Une chose est certaine, loin de résoudre quoique ce soit, l’annexion territoriale turque du nord de la Syrie avalisée par la Russie crée, dans le faits, un creuset qui concentre en un point des très importantes forces militaires, et des volontés antagonistes marquées.

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