Le Congrès américain sonne la charge contre le président Erdogan

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C’était attendu. A peine revenu de la retraite de 2 semaines à laquelle participaient les représentants et les sénateurs américains, le Congrès des Etats-Unis, rassemblant non seulement les parlementaires démocrates mais également de nombreux élus républicains, a immédiatement déclaré, comme il l’avait annoncé il y a 4 jours, qu’il préparait en urgence une série de sanctions contre la Turquie suite à l’attaque des alliés kurdes menée depuis 5 jours maintenant. Concrètement, Washington pourrait mettre sous embargo l’ensemble des livraisons d’arme et système de Défense à Ankara, avec un poids sensiblement plus significatif que lorsque la France, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Suède, la Finlande et la Norvège le font. A noter toutefois que la référence au secteur énergétique semble avoir disparu de la déclaration, mais peut-être sera-t-elle effectivement intégrée dans le texte de loi lui même.

Les forces armées turques utilisent, aujourd’hui, de nombreux systèmes d’arme américains, les Etats-Unis étant son principal fournisseur de technologies de Défense, suivis de l’Espagne et de l’Italie. Ainsi, les forces turques utilisent plus de 350 avions de combat d’origine américaine F16, F5 et F4, plus de 1500 chars de combat M60 et M48, presque 6000 véhicules de combat d’infanterie M113 et ACV-15, ainsi que plus de 450 systèmes d’artillerie mobile M109, M270 et MGM140. Enfin, elles utilisent plus de 300 hélicoptères de facture US, dont des CH47 Chinook et des UH-60 et S70 Black Hawk. Cependant, si la mesure aura incontestablement un poids diplomatique important, son poids operationnel sera, lui, beaucoup plus limité, puisque l’industrie de Défense Turque assure, aujourd’hui, la presque totalité de l’entretien et des modernisations de ses équipements, sans avoir recours aux entreprises américaines et européennes pour cela.

F15 Turquie Actualités Défense | Alliances militaires | Conflit Syrien
Les forces aériennes turques possèdent près de 250 F16 dont 180 ont été amené au standard Blok 50+

La mesure de fermeté des parlementaires américains posera certainement des désagréments à R.T Erdogan, qui sait désormais qu’il a perdu ses derniers soutiens au Sénat américain comme à la chambre des représentants. Mais c’est surtout Donald Trump qui se trouve, par là même, sévèrement isolé, après avoir confirmé, hier, l’ordre de retrait de 1000 membres des forces spéciales américaines qui étaient déployées à proximité des forces kurdes. Les justifications du président à l’abandon des alliés kurdes, comme les appels aux européens à « récupérer leurs ressortissants des prisons kurdes », ont considérablement perdu de leur efficacité, notamment vis-à-vis de l’opinion publique américaine. Même la très fidèle église évangéliste américaine, pilier de l’électorat du président, a annoncé il y a deux jours qu’elle se désolidarisait des positions de D.Trump suite à l’abandon des Kurdes de Syrie.

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Parallèlement, les Kurdes et le gouvernement de Bachar Al Assad ont signé, sous l’égide des autorités russes, un accord visant à empêcher les forces Turques de s’enfoncer en Syrie. Cet accord mena au déploiement rapide de 5000 hommes des forces loyalistes syriennes vers les villes de Kobané et Ras al-Aïn, emportant avec elles les équipements lourds, blindés, systèmes d’artillerie et défenses anti-aériennes, qui font défaut aux kurdes. Les autorités russes, quand à elles, restent extrêmement prudentes et mesurées dans leurs déclarations, tentant visiblement de ramener le président Turc à de plus acceptables positions, sans devoir prendre ouvertement parti contre lui. Mais la détermination de ce dernier, qui sait qu’il joue aujourd’hui une grande partie de sa crédibilité, et donc son avenir politique, risque bien d’amener Vladimir Poutine à devoir une nouvelle fois intervenir en soutien de son allié syrien, si tant est que l’aviation turque venait à engager directement les forces syriennes.

T72 Syrie Actualités Défense | Alliances militaires | Conflit Syrien
Les forces syriennes loyalistes disposent de prés de 2000 chars T72, des blindés capables de faire face aux M60 et M48 qui constituent le corps de bataille turc.

Une chose est certaine, quelque soit la conclusion de cette crise, elle laissera de profondes marques dans les relations entre la Turquie et ces voisins, partenaires ou alliés, qu’ils soient Syriens, Iraniens, Européens, Américains et Russes. Sur la scène internationale, le président Erdogan n’a plus guère comme allié que les autorités Pakistanaises, avec qui il partage une évidente ambition, ainsi que le Qatar, auquel il est lié par les Frères Musulmans. On peut également se demander quel rôle joue la Chine dans cette équation, de part son évidente discrétion sur la question depuis le début de la crise, de part sa proximité avec le Pakistan, et considérant l’intérêt qu’aurait Pékin à nouer une alliance forte avec la Turquie, lui fournissant la position stratégique tant désirée en Méditerranée, au Moyen-Orient et face à l’Europe.

La crise turque-syrienne qui se déroule aujourd’hui apparait, à l’instar de la crise dans les Balkans en 1914, comme le creuset des ambitions de toutes les puissances mondiales et de leur dirigeant, dans un contexte de tensions croissantes et de course aux armements relancée. Reste à voir jusqu’ou cela mènera chacun des acteurs …

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