Retrait anticipĂ© des Jaguar, pas de seconde commande de Rafale, l’Indian Air Force clarifie sa stratĂ©gie d’acquisition

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Quelques jours Ă  peine après avoir pris ses fonctions, l’Air Marshal Bhadauria, Chef d’Etat Major de l’ArmĂ©e de l’Air indienne, a tenu Ă  clarifier la stratĂ©gie d’acquisition de l’Indian Air Force en matière d’avions de chasse dans les prochaines annĂ©es, et cela remet en cause beaucoup d’espoirs et de certitudes …

En premier lieu, le stratĂ©gie d’Ă©quipements reposera sur deux compĂ©titions majeures, le programme Multi-Role Fighter Aircraft, parfois prĂ©sentĂ© comme MMRCA 2, dĂ©jĂ  lancĂ©, et visant Ă  construire 114 appareils pour remplacer les Mig21 et Mig27 encore en service, par un appareil polyvalent et moderne. Le Rafale de Dassault, qui avait gagnĂ© la première compĂ©tition MMRCA en 2012, est opposĂ© au F16V, dĂ©nommĂ© F21 pour l’occasion, de Lockheed-Martin, le Gripen E/F de Saab, le Typhon d’Eurofighter, le F18 E/F de Boeing, et le MIG35 russes, avec une incertitude sur la participation du Su-35. La planification prĂ©voit que 4 escadrons de ce type d’appareils devront ĂŞtre opĂ©rationnels en 2025, et que les 6 escadrons devront ĂŞtre opĂ©rationnels en 2032.

2 Mig21 Bison des forces aeriennes indiennes 1 Analyses DĂ©fense | Aviation de chasse | Conflit Indo-Pakistanais
Les Mig21 de l’IAF doivent tous ĂŞtre retirĂ©s du service d’ici 2032, alors que la moitiĂ© d’entre eux seront retirĂ©s avant la fin de 2021.

La seconde compĂ©tition est le programme Advanced Medium Combat Aircraft, un appareil de cinquième gĂ©nĂ©ration destinĂ© Ă  remplacer les Mig29, mirage 2000 et Jaguar en service. La compĂ©tition n’est pas encore lancĂ©e, mais l’IAF prĂ©voit d’avoir au moins un escadron opĂ©rationnel en 2032 Ă©quipĂ© du nouvel appareil. Ce programme Ă©tait prĂ©alablement une coopĂ©ration indo-russe entamĂ©e depuis 2007 autour d’un appareil dĂ©rivĂ© du PAK FA, le programme FGFA. Mais face Ă  des problèmes de transferts de technologies et des tensions entre new Delhi et Moscou, l’Inde s’est retirĂ© de cette coopĂ©ration en 2018. Mais les rĂ©centes avancĂ©es opĂ©rationnelles autour du programme Su-57, et la politique agressive d’exportation de Moscou Ă  son Ă©gard, pourrait bien amener les autoritĂ©s indiennes Ă  reconsidĂ©rer cette solution, dans un programme dans lequel elles ont dĂ©jĂ  investi plus d’un Milliard de $. A noter Ă©galement que du cotĂ© russe, on affirme que l’Inde ne s’est jamais officiellement retirĂ© du programme, et qu’il a juste Ă©tĂ© retardĂ© Ă  la demande du gouvernement indien.

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Parallèlement, l’Air Marshal Bhadauria a prĂ©cisĂ© que la modernisation en cours des Jaguars de l’IAF, en vue de prolonger leur durĂ©e de vie opĂ©rationnelle jusqu’en 2030, Ă©tait annulĂ©e suite Ă  l’annulation de leur remotorisation, et que les escadrons commenceront Ă  ĂŞtre retirĂ©s du service Ă  partir de 2021, ce qui ne sera pas sans crĂ©er un profond dĂ©ficit opĂ©rationnel en matière d’escadrons de combat. En effet, dans la dĂ©cennie qui s’annonce, l’IAF va perdre ses escadrons de Mig21, de Mig27 et de Jaguar, ainsi qu’une bonne partie de ses mirage 2000 et Mig29,soit prĂ©s de 240 appareils, alors que dans le mĂŞme temps, elle ne recevra que les 36 Rafales, les 83 Tejas Mk1A et Mk2, les 114 MRFA ainsi que 21 Mig29 et 12 Su-30MKI, soit 266 appareils. Cela ne permettra pas de rĂ©sorber le dĂ©ficit de 10 escadrons sur 40 escadrons thĂ©oriques auquel elle fait face aujourd’hui. De fait, mĂŞme dans l’hypothèse ou tous les programmes sont effectivement appliquĂ©s sans dĂ©lais et intĂ©gralement, ce qui est rarement le cas en Inde, il manquera toujours 7 escadrons Ă  l’IAF en 2032 pour atteindre les 40 escadrons jugĂ©s nĂ©cessaires Ă  la protection du pays face au Pakistan et Ă  la Chine.

Les premiers Su57 entreront en service en 2020 dans les forces aeriennes russes Analyses DĂ©fense | Aviation de chasse | Conflit Indo-Pakistanais
La Russie déploie des trésors de diplomatie pour remettre le Su-57 au coeur du programme AMCA

Comme toujours, il faut remettre cette dĂ©claration dans le contexte très spĂ©cifique de la politique de DĂ©fense indienne. Ainsi, si l’Air Marshal Bhadauria a prĂ©cisĂ©, suite Ă  la demande d’un journaliste, qu’il n’y avait aucun plan autre que le programme MRFA pour l’acquisition de Rafale supplĂ©mentaires, cette affirmation doit s’entendre « dans le programme officiel d’approvisionnement de l’IAF aujourd’hui ». Or, ces nĂ©gociations, qui porteraient sur l’acquisition de 2 nouveaux escadrons de Rafale de grĂ© Ă  grĂ© en Paris et New Delhi, sont, selon plusieurs sources concordantes venant d’Inde comme de France, bien avancĂ©es. Et il est peu probable que l’IAF fasse la moue si le PrĂ©sident Moodi lui accordait l’acquisition de ces 36 nouveaux Rafale en 2022, pour palier en parti le retrait anticipĂ© des Jaguars.

Il est Ă©galement probable que, sur la prochaine dĂ©cennie, le programme AMCA avance plus vite qu’identifiĂ© dans le planning prĂ©sentĂ© par le Chef d’Etat-Major de l’IAF. En effet, si les Rafales, les Su-30MKI et les 114 MRFA seront suffisants pour contenir la modernisation de l’armĂ©e de l’air Pakistanaise planifiĂ©e jusqu’Ă  prĂ©sent, avec l’entrĂ©e en service de JF-17 Block III Ă©quipĂ©s d’une avionique moderne, et la modernisation des F16 C/D par la Turquie, il est est tout autrement face Ă  la Chine, qui recevra, durant la dĂ©cennie Ă  venir, au moins 600 nouveaux appareils modernes, dont plusieurs centaines d’avions de 5eme gĂ©nĂ©ration. En outre, on peut parfaitement imaginer que le Pakistan cherchera lui aussi Ă  s’Ă©quiper d’une version export d’un appareil 5G chinois, ou du programme T-FX turque qui doit entrer en service dès 2026.

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JF17 Pakistan Analyses DĂ©fense | Aviation de chasse | Conflit Indo-Pakistanais
Contrairement au Tejas, le JF-17 sino-pakistanais, qui équipe désormais plus de 5 escadrons au Pakistan, est un appareil performant et efficace, qui semble parfaitement remplir les missions qui lui sont confiées

Il est toute de mĂŞme frappant de constater le manque d’Ă©volution dans la politique industrielle d’Ă©quipements de DĂ©fense en Inde, et son manque d’anticipation chronique, alors que le pays, mĂŞme s’il dispose d’une dissuasion nuclĂ©aire, est menacĂ© sur plusieurs fronts par des adversaires qui se modernisent et se renforcent rapidement. Ainsi, l’insistance des autoritĂ©s vis-Ă -vis du Tejas, un appareil de toute Ă©vidence mal nĂ©e, peu performant et très cher en comparaison d’autres appareils lĂ©gers, et notamment le Gripen E/F que Saab souhaite plus que tout positionner en Inde, donne une idĂ©e de l’environnement politique qui conditionne les dĂ©cisions Ă  New Delhi. Malheureusement, dans ces conditions, et face Ă  des adverses beaucoup plus mĂ©thodiques, les chances de voir l’Inde sortir victorieuse d’une confrontation sont de plus en plus minces, alors que le risque de voir un conflit dĂ©gĂ©nĂ©rer vers l’utilisation d’armes nuclĂ©aires, lui, augmente.

Contrairement Ă  1962, la Russie, qui n’est plus l’Union SoviĂ©tique, ne pourra pas, cette fois, imposer Ă  la Chine la retenue, pas plus que les Etats-Unis ou les EuropĂ©ens ne le pourront d’ailleurs. Il faudra probablement d’autres affrontements comme celui du mois de fĂ©vrier 2019, entre les forces aĂ©riennes indiennes et ses voisins, pour que l’insuffisance des moyens qui lui sont consacrĂ©s et le manque d’anticipation dans ce domaine de l’ensemble de la classe politique indienne, soit mis en Ă©vidence. Une situation qui, en fait, n’est pas sans rappeler celle des pays europĂ©ens …

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