vendredi, mars 29, 2024

L’industrie navale chinoise séduit la Thaïlande

Le 5 septembre 2019 eu lieu, aux chantiers naval Wuhan du groupe chinois CSIC, la cérémonie de la pose de la quille du sous-marin S26T à destination des forces navales Thaïlandaises. Ce bâtiment, qui doit être livré en 2021, sera le premier submersible de la flotte Thaïlandaise, par ailleurs une des plus importantes du théâtre sud-Pacifique. Ce fut également l’occasion pour le chef d’Etat-major de la Marine Thaïlandaise de signer un contrat portant sur l’acquisition d’un navire d’assaut Type 071E, également construit par le groupe chinois. La Marine thaïlandaise, qui met déjà en oeuvre 5 frégates de 2000 tonnes Type 053HT de construction chinoise, et 2 frégates S25T de 3000 tonnes construites en partenariat avec la Chine, semble donc amplifier son virage vers les materiels chinois, du moins dans le domaine navale, nonobstant les deux frégates DW3000F acquises auprés de la Corée du Sud récemment.

Mais, si les relations entre Pekin et Bangkok sont effectivement plutôt bonnes, on ne peut, comme c’est parfois le cas, expliquer ces décisions par des questions d’allégeance à la puissance de tutelle. En effet, le choix du modèle chinois s’est fait à l’issue d’une compétition ayant opposé, en 2017, les sous-marins Scorpene de Naval Group, type 209 de TKMS, Projet 636 Kilo russe et DW1400T du sud coréen Daewoo, à un modèle de 2600 tonnes dérivé du Type 039A chinois. Or, le submersible chinois présentait, selon les autorités thaïlandaises, le meilleur rapport performances-prix de la compétition, il est vrais aidé par un tarif à seulement 430 m$, très largement échelonné, et l’intégration de nombreux services complémentaires, et souvent très onéreux, comme la formation des équipages pendant 3 ans, et 2 années de garantie sur le bâtiment lui-même. En outre, le Type 039A dont est dérivé le S26T propose une propulsion anaérobies performante, permettant une patrouille de 21 jours en submersion, et a montré une grande fiabilité.

LPD type 071 de la marine chinoise Actualités Défense | Air Independant Propulsion AIP | Constructions Navales militaires
La Marine Chinoise met en oeuvre 6 LPD Type 071 et a commandé deux unités supplémentaires

La décision surprise de commander un LPD Type 071E (E pour Export) découle probablement d’une réflexion similaire, même si les conditions entourant ce contrat ne sont pas encore clairement connues. Toutefois, il semblerait que le prix proposé par la Chine défie toute concurrence, puisqu’il s’établirait autour de 200 m$ pour un navire de 210 mètre et 25.000 tonnes, capable de mettre en oeuvre 4 Hélicoptères dont 2 lourds, et de mettre à terre jusqu’à 4 compagnies de forces d’assaut amphibies, soit 800 hommes, avec leurs équipements roulant. C’est, à titre de comparaison, 3 fois moins cher que les PHA Mistral de Naval Group cédés à l’Egypte qui, s’ils peuvent mettre en oeuvre 16 hélicoptères de différents types, ont une capacité d’emport et de projection sensiblement similaire. Là encore, l’offre chinoise est certainement accompagnée de conditions de règlement extrêmement favorables, et de plusieurs offres connexes de services. Rappelons, dans le même ordre de grandeur, l’offre de la Chine au Pakistan pour l’acquisition de 4 frégates Type 054A au tarif de 160 m$ l’unité, soit un prix inférieur à nombres de corvettes européennes plus légères et moins performantes.

Ces offres de navires chinois associant un tarif imbattable et des services et conditions de paiement inaccessibles aux groupes occidentaux, préfigurent la stratégie chinoise de prise de contrôle du marché mondial de la construction navale militaire. Face à des tels écarts de prix et de services, même la qualité européenne, il est vrais sensiblement supérieure à celle des bâtiments chinois, ne fera pas longtemps le poids avec des arguments aussi clivants. Les Chantiers navals européens, dont la survie dépend de leurs capacités à trouver des marchés à l’exportation, vont de fait, très probablement, devoir faire face à la diminution rapide du marché mondial adressable, d’autant que d’autres pays, comme la Turquie ou la Corée du Sud, investissent également ce marché avec de sérieux arguments technologiques et politiques, et que la Russie comme les Etats-Unis semblent déterminées à retrouver les parts de marché perdues au cours des deux décennies passées.

Quoiqu’il en soit, la Chine se positionne désormais, et sans précipitation, comme un acteur majeur de l’Industrie navale militaire mondiale, et entend bien faire main basse sur une majeure partie de celui-ci dans les années à venir.

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