La Russie se prépare-t-elle à un conflit majeur ?

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L’Agence Suédoise de recherche sur la Défense, ou FOI, a publié un rapport détaillé étudiant l’évolution des exercices stratégiques en Russie, pour en déduire les objectifs et capacités des forces armées russes. Plusieurs aspects sont particulièrement notables dans ce rapport. En premier lieu, on constate une très importante augmentation du format des exercices auxquels se livrent les forces russes. Ainsi, si en 2010, les exercices rassemblaient 5 à 10.000 hommes, ils en rassemblent désormais entre 100.000 et 150.000. Il en va de même pour la Marine, passant de 10 à 40 bâtiments engagés par exercice, et les forces aériennes, passant de quelques douzaines à plusieurs centaines d’aéronefs par exercice. En outre, les exercices sont devenus majoritairement interarmées, là ou ils étaient consacrés à une seule armée précédemment.

Le second aspect remarquable repose sur les inspections surprises, apparues en 2013, et qui ont considérablement augmenté les capacités de réaction et de préparation des forces armées russes. Ainsi, le rapport estime qu’il ne faudrait désormais que 2 à 4 semaines aux forces russes pour engager une force de 150.000 hommes capable de maintenir une action militaire d’envergure dans la durée. A titre de comparaison, la RAND avait estimé que la France était en mesure de mettre en œuvre 2 brigades mécanisées avec les unités de soutien en 4 semaines (soit 12.000 à 15.000 hommes), comme la Grande-Bretagne, alors que l’Allemagne ou l’Italie peineraient à mettre en œuvre une brigade pleinement opérationnelle dans les même délais.

Enfin, le rapport insiste sur l’amélioration très notable des capacités opérationnelles des forces russes, que ce soit du point de vu de l’entrainement et de l’aguerrissement des effectifs, comme des équipements et de la chaine logistique, et de conclure que désormais, la Russie était en mesure de s’engager dans un conflit de grande envergure, que ce soit contre l’OTAN ou la Chine, et serait capable de soutenir l’effort dans la durée. En projetant les programmes de Défense annoncés, et les reformes engagées, tant en Russie, qu’en occident et en Chine, on s’aperçoit que la Russie bénéficiera du meilleur différentiel de force entre 2025 et 2035, face à l’Europe. Au delà, les programmes de nouvelle génération, comme le SCAF et le MGCS, seront de nature à rétablir la dominance technologique occidentale, en admettant que la Russie reste sur les programmes actuels, comme le Su-57 et le T-14.

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Coté chinois, le différentiel sera satisfaisant à partir de 2030, lorsque la flotte chinoise disposera de 6 porte-avions, des nouveaux croiseurs Type 055 en quantité, et des nouvelles générations de sous-marins, que l’armée de l’air disposera de J-20 en quantité, ainsi que du remplaçant du JH-7 et du H-6, et que l’armée de terre aura finalisé sa transformation vers des équipements modernes, comme le char T-99. Dès lors, la période 2030-2035 apparaît comme la période optimum pour une alliance sino-russe pour s’imposer militairement sur les forces occidentales, afin de redéfinir la carte géopolitique du continent eurasiatique.

Il serait, dès lors, largement profitable pour la France, comme pour les pays Européens, d’adapter leurs programmes de Défense à cette réalité géopolitique. Si l’intention de la Russie de mener une offensive en Europe n’est pas établie, le fait est qu’elle en aura les moyens, comme la Chine aura les moyens de s’imposer sur la ceinture indopacifique. Les deux pays accroissent également leurs efforts diplomatiques pour constituer un réseau d’alliances militaires et économiques garantissant leurs résiliences en cas de conflit majeur : la Russie avec la Biélorussie, le Kazakhstan, la Syrie ou l’Algérie, et la Chine avec le Pakistan ou le Bengladesh. En outre, les deux pays accroissent leurs rapprochements avec l’Iran, comme avec la Turquie, ainsi qu’avec de nombreux pays africains, offrant autant de point d’appuis et de défense. 

Or, les programmes actuels, comme le SCAF, le MGCS, le Tempest britannique, ou les missiles FMAN/FMC, ont un calendrier et une structure visant l’évolution générationnelle des forces européennes au delà de 2035, donc, de toute évidence, au delà de la période de risques maximum. En ajoutant des étapes intermédiaires à ces programmes, de sorte à disposer d’une offre aérienne européenne bénéficiant des dernières évolutions technologiques en 2030, serait dès lors de nature à rééquilibrer les potentiels militaires en Europe, et donc de réduire les risques de conflit. 

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En outre, ces étapes intermédiaires ne nécessiteraient pas la remise en question des objectifs de ces programmes. Ainsi, dans le cadre du MGCS, disposer à partir de 2025 d’un E-MBT pour potentialiser les unités blindées françaises, allemandes, voir d’autres pays européens, serait de nature modérer la supériorité des forces terrestres russes, qui resteront massivement équipées de T72B3M et de T90M. Pour le SCAF, le développement d’une version du Rafale, et peut-être du Typhoon, spécialisé dans la guerre électronique, ainsi que d’un UCAV comparable aux objectifs du FCAS, à horizon 2025/2030, permettraient aux forces aériennes européennes de conserver une capacité d’action dans la profondeur face aux systèmes de Défense anti-aérienne russe, et donc d’en équilibrer le potentiel militaire global.

Les pays européens, ou tout du moins le couple franco-allemand, seraient avisés de mener une étude objective pour la conception d’un Livre Blanc commun, dont l’objectif serait précisément de préparer la période 2025-2035…

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