L’Allemagne joue-t-elle une partition propre dans l’Europe de la Défense ?

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Depuis l’élection du président Macron, le lien franco-allemand est devenu le moteur de la politique de Défense française, avec notamment le programme SCAF de chasseur et de drones de combat de nouvelle génération, le programme MGCS de char de combat ou le successeur des Atlantique et P3C Orion de patrouille maritime. Dans la revue stratégique 2017 comme dans la LPM 2019-2025, la France a d’ailleurs inscrit ce lien de dépendance comme consubstantiel de l’effort de Défense.

La stratégie fait effectivement du sens. Ensemble, la France et l’Allemagne alignent une puissance économique, démographique et technologique amenant potentiellement le couple dans le club très fermé des grandes puissances mondiales. Ainsi, il serait capable sans grand effort de neutraliser la puissance militaire russe, principale menace en Europe aujourd’hui, sans grands efforts.

Cependant, comme le révèle Michel Cabirol dans un article, paru ce lundi dans la Tribune, il semble que l’agenda allemand diffère sensiblement des objectifs communs tels que perçu par la France. 

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Citant le rapport du député du Finistère Jean-Charles Larsonneur, l’Allemagne mettrait en application une stratégie visant à prendre l’ascendant militaire, technologique et industriel sur une majorité de « petits-pays » européens, de sorte à devenir la nation cadre de l’Europe de la Défense au sein de l’OTAN. Cette stratégie viserait, selon le rapport, a renforcer la mainmise de l’industrie allemande de Défense au niveau Européen, comme à renforcer le rôle central de l’Allemagne dans l’OTAN.

Parallèlement, les autorités françaises ont vu leurs craintes prendre forme concernant la dépendance réciproque stratégique, lorsque Me Merkel annonça que l’Allemagne suspendait les licences d’exportation d’armes à l’Arabie Saoudite suite à l’assassinat du journaliste Kashogghi. Loin de ne toucher que les productions allemandes, cette mesure empêche les européens, donc la France, de livrer les A330 MRTT commandés par le Royaume, comme ses partenaires britanniques, italiens et espagnols concernant la livraison de chasseurs Typhoon. Non seulement l’Allemagne entraine ses partenaires avec elle sans rien n’avoir demandé, mais elle a mis la France, mais aussi l’Espagne et le Royaume-Unis dans l’embarras face à leur opinion publique, en appelant l’ensemble des pays européens à suivre son exemple. Pourtant, le problème de la liberté d’exporter les équipements fut un des premiers dossiers mis sur la table par Paris lors des discussion autour du SCAF, et Berlin s’était engagée à ne pas gêner les décisions d’exportation françaises.

Ajouter à cela l’affaiblissement politique de Me Merkel dans son propre pays, mettant de nombreuses initiatives, notamment concernant l’Europe de la Défense, sur Pause, il n’en faut pas plus pour que les inquiétudes concernant la pertinence de la position française dans ce domaine.

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Et aux vus des arguments avancés, il semble en effet avéré que l’Allemagne ne met pas dans le couple franco-allemand la même conviction que la France pour la construction d’une Europe de la Défense forte et indépendante, contrairement aux engagements qui furent pris par Berlin. 

Avec un peu de recul, on ne peu que constater que les autorités allemandes appliquent à la France la même stratégie que celles qu’elles ont toujours appliqué en matière de coopération de Défense : Se rendre indispensable et incontournable par le volume économique promis, pour en tirer le meilleur retour économique.

Malheureusement, la situation aujourd’hui n’est plus celle du début des années 90, et la détérioration des relations internationales en Europe comme ailleurs, ne permet plus de jouer à ce genre de jeu. La problématique aujourd’hui n’est plus de tirer les meilleurs bénéfices industriels des investissements de Défense, mais bien de construire et coordonner une puissance militaire capable de protéger le continent et les intérêts vitaux de l’Union et de ses membres. 

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C’est donc en apportant une réponse rapide, dimensionnée et immédiate aux besoins de Défense de l’Europe que la France pourra, éventuellement, rétablir un rapport de force ramenant l’Allemagne à des disposition plus compatibles avec les objectifs de la France. En montrant qu’elle est capable de trouver les ressources nécessaires pour apporter une réponse aux menaces actuelles, tout en renforçant son industrie de Défense sur la scène Européenne, la France pourra faire évoluer son image dans les capitales européennes, et commencer à fédérer les européens autour de sa propre vision de l’Europe de la Défense.

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