vendredi, mars 29, 2024

Les Etats-Unis (et leurs alliés) peuvent-ils faire face à une coalition sino-russe ?

Dans son Index annuel de la puissance militaire US, la fondation Heritage dresse un portrait inquiétantde l’Etat de préparation et du potentiel de défense des forces américaines. Ainsi, si l’US Army s’est résolument tournée vers un programme de modernisation maitrisé et cohérent, et a entrepris de profonds changements en matière d’entrainement et de préparation opérationnel, lui valant une classification « Forte » par le rapport, l’US Navy, l’US Air Force et l’US Marines Corps sont tous 3 classés faibles, sanctionnant les programmes très mal maitrisés d’armement et le manque de cohérence dans la préparation opérationnelle des forces.

Dans les faits, le rapport relève qu’aujourd’hui, les Etats-Unis et leurs alliés européens et asiatiques auraient beaucoup de difficultés pour garder l’avantage face à une coalition sino-russe agissant de concert.

Et la situation n’est pas prête de s’inverser. En effet, la montée en puissance chinoise en matière de forces militaires est telle, que d’ici 2030, il est probable que l’ensemble des forces expéditionnaires américaines serait nécessaire pour s’opposer à la puissance chinoise. Cela laisserait évidemment l’Europe sans protection US, et donc très vulnérable face à la puissance militaire russe, elle aussi en forte croissance. 

A l’inverse, si la situation venait à se dégrader en Europe, le soutien américain nécessaire serait tel que la zone Pacifique serait très exposée à une action chinoise.

Depuis l’arrivée du Général Mattis au secrétariat des armées, de nombreux changements ont été entrepris pour corriger les principales faiblesses des forces US, notamment concernant l’état de préparation et de disponibilité des forces. Mais il faudra plusieurs années, plus probablement une décennie complète, pour que l’armée américaine retrouve un niveau de puissance comparable à celui des années 90. 

De fait, entre 2020 et 2030, l’écart de puissance restera très favorable pour les adversaires potentiels aux Etats-Unis et leurs alliés, et la tentation sera importante d’utiliser ce rapport de force inédit dans l’histoire moderne pour redistribuer les cartes de la géopolitique mondiale.

Or, de tous les théâtres potentiels des Etats-Unis, le plus vulnérable aujourd’hui reste, sans aucun doute, l’Europe. Les armées de européennes restent très largement contraintes dans des considérations budgétaires et idéologiques de fin de guerre froide, et peinent à revenir à la réalité de leur vulnérabilité. A titre d’exemple, la Russie disposera en 2025 de prés de 5000 chars de combat modernes, là ou l’Europe n’en alignera pas 1000. En outre, l’avantage technologique des équipements européens s’est largement déprécié face aux modernisations des systèmes russes, et les forces aériennes de l’OTAN, portant les ¾ de la puissance de feu de l’alliance, seront très exposées face aux nouveaux systèmes de défense anti-aériens S-400/500, Buk M2, SHONA et Pantsir.

Pourtant, les programmes de modernisations des équipements européens, indispensables pour préserver le rapport de force suffisant pour interdire toute initiative malheureuse, ne sont pour la plupart prévu d’entrer en service qu’au delà de 2030, voir 2040 pour le SCAF franco-allemand, et aucune initiative visant à renforcer numériquement les forces actuelles n’est pour l’heure planifié, contrairement à ce qui se passe au Japon, en Australie ou en Corée du Sud.

Ainsi, l’Europe a devenir le ventre mou du dispositif US, et l’on comprend dès lors la pression mise par les autorités américaines au gouvernants européens pour combler le gap. Toutefois, on peu s’interroger sur les raisons qui amènent la deuxième puissance économique mondiale à se mettre elle-même dans une telle situation de vulnérabilité, et à parier son avenir sur la protection américaine sans avoir la clairvoyance d’anticiper le scénario sino-russe. 

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