jeudi, mars 28, 2024

Les difficultés de la Défense allemande peuvent-ils être résolus par l’augmentation de son budget ?

Depuis quelques mois, la Défense et les armées allemandes font l’objet d’un traitement médiatique et politique peu enviable et peu élogieux. D’un coté, le président Trump a fait de l’Allemagne l’exemple du manque d’investissements des pays européens dans l’OTAN et dans leur Défense. D’autre part, de nombreux articles ont dénoncé la très faible disponibilité des équipements majeurs des armées allemandes, comme les avions de chasse, les chars de combat, les frégates et les sous-marins.

Dans le deux cas, c’est le budget attribué au ministère de la Défense qui a été pointé du doigt, avec en ligne de mire la règle élevée au rang de dogme des « 2% de PIB ». 

Comme souvent, la situation est plus complexe, et la seule augmentation du budget de la défense ne permettrait probablement pas de résoudre les défaillances opérationnelles allemands à eux seuls.

Il est vrai que le budget de la Défense allemand a connu une forte déflation face au PIB du pays depuis 1990. En Euro constants, les dépenses ont également légèrement baissées avant de stagner pendant prés de 20 ans. Comme pour beaucoup de pays, les gouvernements allemands successifs se sont laissés grisés par les « bénéfices de la paix », au point de développer une certaine myopie vis-à-vis des évolutions géopolitiques mondiales. Et comme beaucoup d’armées européennes, les armées allemandes ont été confrontées au paradigme « faire toujours mieux pour toujours moins cher ». En ce sens, la situation actuelle des forces allemandes est parfaitement représentative de ce qu’aurait été celle des forces françaises si la LPM 2019-2025 n’avait pas inversé la tendance. Cette épée de Damoclès pèse toujours sur les armées françaises, si les engagements de la LPM n’étaient pas respectés. 

Mais au delà de la question budgétaire, c’est la conception même de la Défense par les autorités allemandes qui pose problème, et qui entrave la reconstruction de l’outil militaire allemand. Ainsi, pour de nombreux dirigeants allemands, le pilotage de la Défense au seul périmètre de la dépense est l’axiome de la soutenabilité de l’effort de Défense. C’est cette approche qui explique les dérives procédurales et législatives qui empêchent, aujourd’hui, les forces allemandes d’organiser leurs flux logistiques. En outre, si le modèle économique et social allemand est souvent cité en exemple en Europe, il est construit sur une base extrêmement fragile, la démographie du pays. La faible natalité et l’augmentation de l’espérance de vie génèrent un risque très important dans l’avenir pour les équilibres financiers allemands, risques que les tenants de l’orthodoxie financière veulent contenir en réduisant au maximum les « dépenses non productives » de l’Etat.

De fait, même lorsque Me Merkel s’engage à mettre l’accent sur l’effort de Défense, de nombreux contre-pouvoirs entravent les initiatives de la chancelière. `

Enfin, la population allemande elle-même est peu concernée, si pas hostile, par les questions de Défense, et les armées ont beaucoup de difficultés à recruter et conserver leurs effectifs.

Il apparaît donc que l’augmentation du budget de l’effort de Défense allemand est loin d’être suffisant pour reconstruire le force militaire opérationnelle nécessaire à la défense du pays. Elle doit s’accompagner d’une réflexion profonde sur le rôle de la Défense sur l’Economie du Pays, ainsi que d’une importante phase de communication pour expliquer aux électeurs allemands les enjeux d’une telle Défense, pour le Pays comme pour l’Europe.

En ce sens, la situation de la Défense et des forces armées de notre voisin n’est autre qu’un miroir grossissant des problèmes et des difficultés françaises, et les solutions de l’un doivent donc pouvoir s’appliquer à l’autre.

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