Paris et Ryad tentent de trouver un nouveau modus operandi

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A l’occasion de la visite en France du prince héritier du royaume d’Arabie Saoudite, Mohammed bin Salman, le président Macron et la diplomatie française tentent de rétablir un lien très distendu entre les deux pays, sous couvert de crise avec l’Iran, et de désaccord sur l’entreprise ODAS.

L’objectif de Paris est de redevenir un partenaire privilégié du Royaume, notamment en ce qui concerne les marchés d’armements, Ryad ayant été pendant longtemps le plus important client des entreprises de Défense françaises. A la clé se trouvent des contrats pour Naval Group, Nexter, MBDA et Thales. 

Le prince MBS a posé clairement les conditions pour que les entreprises françaises puissent à nouveau bénéficier des contrats Saoudiens : une saoudisation à hauteur de 50% des contrats d’armements, ce que les entreprises maitrisent parfaitement, et un durcissement de la position française vis à vis de l’Iran. C’est probablement sur ce dernier point que les négociations porteront, E.Macron a déclaré à cette occasion  que la France ne se faisait pas dicter sa politique extérieure.

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Les relations d’excellences entre la France et le Royaume Saoudien se sont construites initialement sur les positions pro-arabes françaises suite à la guerre des 6 jours, et l’embargo mis en Å“uvre par Paris sur les armes à destinations d’Israël. Ryad a non seulement acheté de nombreux équipements de Défense à la France, parmi lesquels des frégates, des pétroliers ravitailleurs, des canons automoteurs, des missiles anti-aériens, des VAB (liste non-exhaustive), mais a également financé l’équipement de plusieurs armées arabes, comme l’Irak qui reçu des mirage F1, des missiles Exocet et des canons automoteurs AUF1 français, ou plus récemment les égyptiens qui purent acquérir leurs Rafales, Gowind, FREMM et BPC avec l’aide Saoudienne. Il finança également l’équipement de groupes de rebelles, comme les moudjahidin Afghans et les rebelles Syriens. Or, depuis l’accord sur la levée des sanctions contre l’Iran en contrepartie de l’abandon de son programme nucléaire militaire, les relations entre les deux capitales se sont tendues, et les contrats raréfiés. 

Par chance, c’est au même moment que la Chine, puis l’Inde intensifièrent leurs commandes en France, de sorte que l’impact négatif sur l’industrie de Défense nationale n’aura été que mineur. Toutefois, cette situation est symptomatique d’un risque majeur qui pèse sur l’industrie de Défense française depuis de nombreuses années.

Aujourd’hui, le poids des exportations sur le chiffre d’affaire des entreprises de Défense française attient le seuil de 50%. Or, les clients majeurs, comme l’était l’Arabie Saoudite, ou comme le sont aujourd’hui l’Egypte et l’Inde, sont, par nature, versatiles, ainsi que l’exemple saoudien le montre. D’autre part, ces exportations ont trop souvent été préemptées par la planification d’Etat pour équilibrer l’activité industrielle et la R&D de l’ensemble de l’écosystème Défense national.

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En d’autres termes, l’industrie de Défense française est construite sur des fondations bien peu solides. C’est pour cette raison que Naval Group est parvenu à imposer la FTI à la Marine Nationale, qui aurait largement préféré recevoir des FREMM. Il était  en effet indispensable de maintenir l’activité des bureaux d’études du groupe, et proposer pour l’exportation un navire de tonnage inferieur aux FREMM, répondant davantage aux attentes de la majorité des clients.

De fait, non seulement l’exposition aux exportations de l’industrie de Défense Française fait courir un risque à l’ensemble de son écosystème, mais il conditionne l’efficacité même de la Défense nationale, dénaturant à l’extrême les objectifs fondamentaux du recours aux exportations, sensé préserver et renforcer l’outil industriel au profit de l’efficacité opérationnelle et économique de l’investissement de défense national. En outre, ce risque est aujourd’hui accentué par les exigences des clients concernant les transferts de technologie et la fabrication locale accompagnant la majorité des programmes exports. 

Dans un contexte de plus en plus concurrentiel, avec l’arrivée d’acteurs asiatiques, et bientôt sud-américains et moyen-orientaux sur le marché de l’armement, la survie de l’industrie de Défense française dépendra avant tout de sa capacité à s’appuyer sur des commandes domestiques suffisantes, faute de quoi le risque de voir l’outil industriel français se déliter dans la concentration européenne sera très important.

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